L’expression « émissions évitées » ou « scope 4 » devient de plus en plus courante. Cette notion, bien que complexe, est essentielle pour évaluer l’efficacité de nos efforts pour freiner le réchauffement planétaire. Elle permet notamment de mesurer l'impact positif d'un produit ou d'un service sur son environnement.
Qu'est-ce que le scope 4 ?
Définition d'une émission évitée
Le Scope 4, selon le GHG Protocol, englobe les émissions qui sont évitées grâce à l'adoption d'un produit ou service alternatif, ayant une moindre empreinte carbone par rapport à d'autres options traditionnelles qui rempliraient la même fonction.
La définition de l'ADEME
“Les "émissions évitées" par une organisation concernent les réductions d'émissions réalisées par ses activités, produits et/ou services, lorsque ces réductions se réalisent en dehors de son périmètre d'activité. Elles sont évaluées au regard d'un scénario de référence.”
Quelques exemples de produits ou services proposant des émissions évitées
Voici quelques exemples de produits ou de services qui peuvent contribuer à des émissions évitées en comparaison avec leurs alternatives traditionnelles :
- Véhicules électriques : Comparés aux voitures fonctionnant avec des carburants fossiles, les véhicules électriques émettent nettement moins de CO2 lorsqu'ils sont alimentés par des sources d'énergie renouvelable.
- Ampoules LED : Elles consomment moins d'énergie et ont une durée de vie plus longue que les ampoules incandescentes, réduisant ainsi les émissions liées à la production d'électricité.
- Systèmes de chauffage géothermique : Ils utilisent la chaleur de la terre pour chauffer ou refroidir les bâtiments, ce qui est plus efficace et génère moins d'émissions que les systèmes de chauffage traditionnels.
- Produits alimentaires à base de plantes : Les alternatives végétales à la viande, comme les steaks à base de plantes, ont souvent une empreinte carbone réduite par rapport à la viande d'élevage traditionnelle.
- Plateformes de covoiturage : Elles permettent de réduire le nombre de véhicules sur la route, réduisant ainsi les émissions globales de CO2.
- Logiciels de gestion énergétique : Ces outils aident les entreprises et les ménages à surveiller et à réduire leur consommation d'énergie, contribuant à une diminution de l'empreinte carbone.
- Vêtements fabriqués à partir de matériaux recyclés : En utilisant des matériaux déjà en circulation plutôt que de nouvelles ressources, ces vêtements ont souvent une empreinte carbone plus faible.
Différences entre le Scope 3 et Scope 4
Les émissions directes et indirectes (Scopes 1, 2 et 3) et émissions évitées (Scope 4) sont deux concepts distincts avec des implications différentes pour la responsabilité environnementale d'une entreprise :
- Émissions indirectes (Scope 2 et 3) : Ces émissions se rapportent à l'impact carbone associé à l'activité de l'entreprise mais qui ne se produit pas directement au sein de ses installations. Elles englobent les émissions qui surviennent ailleurs dans la chaîne de valeur. Bien qu'elles soient "indirectes", elles représentent néanmoins des émissions concrètes et mesurables. Par exemple, l'énergie achetée ou les émissions liées à la fabrication d'un produit par un fournisseur externe. Suite au décret du 1er juillet 2022, les entreprises soumises à la DPEF sont désormais tenues de prendre en compte ces émissions dans leur Bilan d'Émissions de Gaz à Effet de Serre (BEGES).
- Émissions évitées (Scope 4) : Cette catégorie se concentre sur l'empreinte carbone que les produits ou services d'une entreprise peuvent permettre d'éviter par rapport à d'autres alternatives sur le marché. Plutôt que de refléter des émissions réelles, elles sont basées sur une comparaison avec un scénario de référence hypothétique, ce qui les rend "virtuelles". Par exemple, l'utilisation d'une ampoule LED à la place d'une ampoule incandescente permet d'éviter certaines émissions. Toutefois, il est crucial de noter que ces émissions évitées ne doivent pas être incorporées dans le bilan carbone officiel de l'entreprise car elles ne représentent pas des réductions directes réalisées par l'entreprise elle-même.
Ces distinctions sont essentielles pour garantir une comptabilité carbone transparente et éviter la "double comptabilité" où les mêmes réductions sont revendiquées par plusieurs entités.
Un socle de la Net zéro initiative (NZI) pour la neutralité carbone
La Net Zéro Initiative (NZI) a ainsi établi un cadre tripartite pour aider les entreprises à progresser vers l'objectif de la neutralité carbone :
- Réduction des émissions : Ce pilier concerne la réduction effective des émissions de gaz à effet de serre générées directement ou indirectement par l'entreprise. En utilisant un bilan carbone, l'entreprise mesure ses émissions associées aux scopes 1 (émissions directes), 2 (émissions indirectes liées à la consommation d'électricité) et 3 (autres émissions indirectes, comme celles des fournisseurs). Suite à cette évaluation, l'entreprise élabore et met en œuvre un plan d'action visant à réduire ces émissions.
- Évitement d'émissions : Il s'agit ici d'orienter l'activité de l'entreprise de manière à proposer des solutions qui génèrent moins d'émissions par rapport à d'autres alternatives existantes sur le marché. Par exemple, une entreprise produisant des véhicules électriques permettrait d'éviter les émissions générées par des véhicules fonctionnant avec des carburants fossiles.
- Création de puits de carbone : Ce dernier pilier vise à développer ou à soutenir des projets qui capturent activement et stockent le CO2 présent dans l'atmosphère. Cela peut se faire, par exemple, par la reforestation, l'agroforesterie ou d'autres méthodes de séquestration du carbone.
En combinant ces trois piliers, les entreprises peuvent adopter une approche holistique pour atteindre la neutralité carbone, tout en contribuant activement à la lutte contre le changement climatique.
Comment calculer les émissions évitées ?
Existe-t-il un référentiel pour le calcul des émissions évitées ?
La Net Zero Initiative (NZI) suggère une approche méthodologique structurée en trois étapes pour le calcul des émissions carbone évitées. Bien qu'il n'y ait pas de norme internationale unique pour cette quantification, la méthodologie NZI offre une rigueur qui est largement reconnue.
Les étapes pour le calcul des émissions évitées
1) Identifier le produit ou le service à évaluer
Avant d'évaluer les émissions évitées (scope 4) d'un produit ou service, il faut déterminer leur pertinence en fonction de trois critères essentiels :
- Conformité aux Accords de Paris : La solution envisagée doit s'aligner sur l'objectif de limiter le réchauffement climatique à moins de 1,5 °C.
- Non-soutien à des activités non alignées : Elle ne doit pas encourager, à long terme, des activités contraires à cet objectif. Un exemple serait d'améliorer un moteur d'avion qui utilise toujours du kérosène.
- Pas d'effets collatéraux : La solution choisie ne doit pas avoir d'impact négatif notable sur d'autres indicateurs environnementaux, que ce soit sur la biodiversité, la pollution ou d'autres aspects comme l'acidification des eaux.
2) Réaliser le bilan carbone de la solution
La première étape pour déterminer les émissions évitées est d'évaluer les émissions directement liées à la solution proposée :
- Définir le scénario de la solution : Comprendre dans quel contexte la solution est mise en œuvre, que ce soit le contexte de vente, le pays d'utilisation ou d'autres facteurs pertinents.
- Adopter une approche de cycle de vie : Les émissions associées au produit ou service doivent être évaluées tout au long de son cycle de vie.
- Fabrication : Mesurer les émissions générées lors de la production du produit ou de la prestation du service.
- Transport : Comprendre l'empreinte carbone liée au transport du produit, de sa source au consommateur.
- Usage : Estimer les émissions générées pendant que le produit est utilisé ou que le service est rendu.
- Fin de vie : Évaluer les émissions résultant de la mise au rebut, du recyclage ou de toute autre méthode de fin de vie du produit ou service.
Cette évaluation globale offre une vision complète de l'empreinte carbone réelle de la solution, permettant ainsi de mieux déterminer les émissions potentiellement évitées.
3) Mettre en place le scénario de référence
La deuxième étape dans le calcul des émissions évitées est de définir ce qui se serait passé en l'absence de la solution décarbonante, c'est-à-dire d'établir un "scénario de référence". Voici un résumé simplifié de cette étape :
- Définir le contexte sans la solution décarbonante : Quels auraient été les émissions de gaz à effet de serre sans la mise en place de cette solution ?
- Types de Scénarios de Référence selon la NZI :
- Situation Précédente : Reprendre les émissions de GES antérieures et extrapoler leur évolution sans le nouveau produit ou service.
- Comparaison avec les Alternatives : Estimer les émissions moyennes des autres solutions qui auraient pu être utilisées à la place de la solution décarbonante.
- Importance du Choix du Scénario de Référence :
- C'est le fondement du calcul des émissions évitées. Une mauvaise définition pourrait fausser significativement les résultats.
- Il faut éviter la surévaluation de l'impact positif de la solution pour garantir la crédibilité du calcul.
- L’ADEME souligne l'importance de justifier le choix du scénario, de le décrire en détail et de clarifier les hypothèses qui le sous-tendent.
Cette étape est cruciale et nécessite une approche rigoureuse pour assurer la validité et l'intégrité des résultats finaux.
4) Calculer les émissions évitées
La troisième étape du calcul des émissions évitées se concentre sur la détermination précise de ces émissions. Voici une synthèse simplifiée de cette étape :
- Formule de Base :
- Émissions évitées = Émissions du scénario de référence - Émissions de la solution.
- Application à l'Échelle de l'Entreprise :
- Pour obtenir les émissions évitées totales de l'entreprise, additionnez les émissions évitées pour chaque produit ou service vendu.
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L'entreprise Orki propose un accompagnement complet pour mesurer les émissions évitées conformément à l'initiative Net Zéro.
Pourquoi calculer ses émissions évitées ?
Un avantage compétitif pour les produits et acteurs de la transition
Le calcul des émissions évitées est une manière novatrice d'appréhender l'impact environnemental des entreprises actrices de la transition. Cela permet également à toutes les parties prenantes de bénéficier d'une vue plus claire de l'empreinte carbone, favorisant la confiance et la collaboration.
- Business Model réinventé : le focus n'est plus seulement sur la minimisation de l'empreinte carbone, mais également sur la maximisation de la contribution positive. Il s'agit de s'aligner avec une vision globale de neutralité carbone, adaptée à un monde qui vise des émissions nettes nulles.
- Valorisation de l'éco-responsabilité : les entreprises éco-responsables, comme les boutiques de seconde main ou les reconditionneurs, offrent des alternatives moins polluantes. Augmenter leur activité signifie réduire la demande pour des produits neufs et plus polluants.
- Avantages Stratégiques :
- Image : En montrant concrètement leur contribution positive, ces entreprises renforcent leur image éco-responsable.
- Clientèle : Un atout majeur pour attirer une clientèle de plus en plus consciente des enjeux environnementaux.
- Investisseurs : Un argument fort pour attirer des investisseurs responsables cherchant à financer des initiatives durables.
- Partenaires : Les entreprises avec un impact environnemental positif peuvent nouer des partenariats privilégiés avec d'autres acteurs partageant les mêmes valeurs.
Vers une Économie Bas-Carbone :
L’orientation de l’économie vers des pratiques éco-responsables n'est pas synonyme de compromis économique. Au contraire, des études montrent que l’écoconception peut augmenter le chiffre d’affaires, renforcer la satisfaction client et améliorer les performances des produits. La prise de conscience collective, couplée à des actions concrètes, peut piloter l’industrie vers un avenir plus durable.
Les complexités liées au calcul des émissions évitées
Il existe plusieurs complexités liées au calcul des émissions évitées :
- Incertitudes inhérentes :
- Scénario de référence : Le choix du scénario influence directement le résultat. Sa définition reste délicate, car il est basé sur des prédictions et des hypothèses qui peuvent varier.
- Résultats variables : Même avec une méthodologie rigoureuse, les émissions évitées peuvent être imprécises, inégales ou surévaluées.
- Limitations de l'indicateur :
- Perspective à court terme vs à long terme : Certaines solutions peuvent être pertinentes aujourd'hui, mais incompatibles avec des objectifs climatiques futurs.
- Évaluation incomplète : La seule mesure des émissions évitées ne suffit pas pour déterminer si un produit ou un service est pleinement bénéfique pour le climat.
- Priorité à la réduction directe :
- Avant de mettre en avant les émissions évitées, une entreprise doit s'assurer d'avoir minimisé ses propres émissions.
- L'action sur la chaîne de valeur globale est essentielle, renforçant la responsabilité de chaque acteur.
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Bien communiquer sur les émissions évitées
Pour renforcer la légitimité de leurs démarches environnementales, les entreprises doivent se conformer à certaines directives lorsqu'elles communiquent sur les émissions de CO2 évitées. Ces directives, édictées par l’ADEME et la NZI, stipulent entre autres que :
- Il est interdit d'intégrer les émissions évitées dans le bilan carbone global de l'entreprise. De même, ces émissions ne doivent pas servir à prétendre à un statut de "neutralité carbone" ou de "zéro net". Au lieu de cela, elles devraient être présentées séparément du bilan d'émissions de gaz à effet de serre.
- Une communication transparente et détaillée est essentielle. Les entreprises doivent spécifier quel pourcentage de leurs ventes a contribué à ces émissions évitées. Elles doivent également décrire les méthodologies, les hypothèses, d'éventuels effets rebonds et les limites liées à leur calcul.
Par exemple, une bonne communication serait : "Grâce à certains de nos produits, qui représentent 32% de nos ventes, nous avons contribué à éviter l'émission de 1000 tCO2e cette année." En revanche, une communication simplifiée telle que "Nous avons évité 1000 tCO2e cette année" est à proscrire.
- Plutôt que de s'attribuer tout le mérite des émissions évitées, les entreprises devraient parler de leur "contribution" à ces émissions évitées. Prenons l'exemple d'une ligne de TGV qui réduit le besoin de voyages en avion. Plusieurs parties prenantes, comme le gestionnaire du réseau ferroviaire, le fabricant des trains et le fournisseur d'électricité, ont joué un rôle dans cette réduction.
- La communication doit être accessible et claire pour le public, tout en respectant les normes ISO relatives aux émissions de gaz à effet de serre.
- En raison de la complexité des méthodologies de calcul des émissions évitées, il est judicieux de procéder à une vérification externe pour renforcer la crédibilité de l'entreprise, comme le suggère la norme ISO 14044.
Trouver des produits et services ayant un impact positif sur son environnement
Identifier et intégrer des produits qui permettent d'éviter certaines émissions devient une partie intégrante de la stratégie de réduction des entreprises et d'une politique d'achats éco-responsable ambitieuse.
Wearegreen propose aux entreprises un catalogue de solutions bas-carbone pour les aider à identifier des alternatives durables. C'est également une vitrine pour les entreprises proposant des alternatives éco-responsables.
Si vous êtes intéressés pour référencer un produit ou un service bas-carbone, contactez-nous.